Un très long voyage à Acapulco dans une Buick noire du début des années soixante. Je regarde par la lunette arrière de la voiture. Ce paysage à l’envers m’incite à compter les arbres qui surgissent comme des coups de fouet. Partir à Acapulco, c’est se lever aux aurores et supporter une chaleur terrible pour avoir le bonheur d’y trouver une mer chaude, si différente de celle des terres froides d’antan.
Iguala, Tierra Caliente, Chilpancingo. Torpeur, impatience, agitation. On est encore loin ? Celui qui voit la mer en premier a gagné. J’ai gagné ! Non, c’est moi, rétorque mon frère, persuadé que c’est ainsi que la guerre de Troie a commencé.
À l’aube, avant que le soleil se lève, mon père me réveille. « Tu viens nager ? » Je peine à me lever et à me déshabiller, mais je parviens à enfiler mon maillot de bain et à filer à la plage en le tenant par la main. Le clair de lune illumine les vagues. Nous entrons dans une eau à peine plus fraîche que l’air. Des pêcheurs tirent leurs barques sur le sable. Ils nous disent « bonjour » et je leur réponds « bonne nuit ».